Point historique sur le BMW Z4 Coupé
L’histoire de la série Z, chez BMW, commence en 1987 avec la rarissime Z1. Un roadster avant-gardiste qui pose les bases, mais c’est la Z3, en 1995, qui fait entrer la lignée dans une nouvelle dimension. Large choix de moteurs, ligne séduisante, succès assuré. Le cabriolet ouvre le bal, puis vient le coupé en 1997, fruit de la patte visionnaire de Chris Bangle. Le designer impose alors ses volumes sculptés et ses lignes audacieuses. Des traits qui trouveront leur apogée avec le Z4 roadster de 2003, reconnaissable entre mille grâce à son fameux « flame surfacing ». Le Z3 Coupé n’avait pourtant pas brillé avec ses 16 000 exemplaires seulement. Qu’importe. BMW persiste. Quatre ans plus tard, le coupé Z4 reprend le flambeau, prêt à faire oublier les doutes passés.
À sa sortie, le Z4 roadster divise. Plus large, plus long, radicalement moderne. Sur photo, il surprend. En vrai, il séduit. La rupture avec le Z3 d’inspiration rétro est totale. La carrosserie se veut racée, tendue, pleine de nerfs. L’aérodynamique progresse nettement : le Cx chute de 0,42 à 0,35. Pas de provocation gratuite, mais un savant mélange de courbes douces, de lignes franches et de volumes concaves. Du pur Bangle. Sous le capot, la première phase (2003-2006) propose un 4 cylindres 2.0 et trois six-cylindres en ligne : 2.2, 2.5 et 3.0. La seconde phase (2006-2008) abandonne le 2.2 mais conserve le 2.0. Elle accueille surtout une version M, armée du six-cylindres 3.2 S54 issu de la M3 E46.
Le concept du Z4 coupé est révélé à Francfort en 2005. Six mois plus tard, Genève accueille la version de série. Le style tranche avec le Z3 Coupé, avec ses vitres généreuses et son look de break de chasse néo-rétro. Place à une silhouette plus tendue, plus radicale. Une évolution qui s’inscrit dans la continuité du roadster et qui reprend l’esprit du concept X Coupé dévoilé en 2001. La version de série reste fidèle au concept, elle reçoit simplement les évolutions stylistiques du facelift. Le coupé n’est disponible qu’en deux motorisations : 3.0si pour la version classique et 3.2 pour la version Motorsport. Il a été produit entre 2006 et 2008 à 17 061 exemplaires, toutes versions confondues.
Coupé audacieux
Je tourne lentement autour de ma Z4 Coupé E86, comme on fait le tour d’une sculpture qu’on connaît déjà par cœur, mais qui surprend toujours lorsque la lumière change. Sous le ciel chargé, la teinte Carbonschwarz prend d’abord un noir profond, presque liquide. Puis quand un rayon s’échappe, le noir se fissure en bleu nuit métallisé, un reflet d’encre qui trahit son appartenance, sur ce modèle, au programme BMW Individual. Cette teinte, elle accroche les lignes, polit les concavités. On observe parfaitement le coup de crayon Bangle : le fameux flame surfacing, ce jeu d’oppositions entre surfaces concaves et convexes, de tensions et de contre-tensions. Le projet est signé par Anders Warming sous la direction de Chris Bangle, et l’on retrouve ici cette volonté d’exprimer la dynamique à l’arrêt.
Je la regarde de face, le capot en coquille à long porte-à-faux étire la silhouette vers l’horizon tel un nez de squale. Deux lignes de force partent du blason central et s’éloignent en accent circonflexe, compressant le volume au-dessus des double haricots, et guidant l’œil vers les projecteurs ellipsoïdaux sous des paupières nerveuses. La prise d’air centrale est basse et large. De part et d’autre, les antibrouillards encadrent des écopes qui suggèrent le refroidissement des freins, sans jamais tomber dans l’exagération. On est dans la sportivité contenue, cette élégance allemande qui préfère la tension à la démonstration.
C’est en allant sur le profil que la magie se révèle. La signature latérale compose littéralement un « Z » dans la carrosserie : une arête supérieure qui file depuis l’aile avant et décroche au niveau de la poignée, et une contre-ligne inférieure creusée dans le bas de porte. Une arête diagonale relie les deux lignes principales du flanc, pour former la fameuse signature du modèle. Elle traverse l’aile avant d’être interrompue au milieu par le répétiteur latéral intégré dans le logo BMW qui y est apposé. Un détail à la fois fonctionnel et ornemental. Les rétroviseurs sont dessinés pour être aérodynamiques. Le pavillon adopte un subtil double bossage qui file vers une lunette fastback, puis vers un becquet moulé dans le hayon. Les ailes arrière sont musclées, et remontent pour poser la voiture sur ses roues arrière. Entre les deux, le flanc concave allège le volume. Le Hofmeister-Kink, un retour d’angle bref et nerveux qui encadre la custode ramassée, est le signe de l’appartenance à la marque bavaroise.
A l’origine, les jantes Style 135 de 18 pouces ont été choisies par le premier propriétaire. Il a opté ensuite pour des jantes Style 127 en 19 pouces légèrement concaves à l’arrière. Elles remplissent un peu plus les passages de roues en donnant une touche un peu plus sportive. Les caches moyeux sont flottants pour permettre au logo BMW d’être toujours dans le bon sens et bien droit. Les branches fines et ajourées laissent voir les disques, 325 mm à l’avant et 294 mm à l’arrière. Les étriers sont mono piston sur les deux trains.
À l’arrière, elle se distingue nettement du roadster : la lame de hayon intégrée crée un décroché aérodynamique, tandis que la lunette, en goutte d’eau, resserre visuellement la croupe avant de l’évaser sur les ailes. Les petits feux sont en forme de goutte. La double sortie chromée suggère tout de suite la sonorité typique du 6 cylindres en ligne. J’en profite pour ouvrir le coffre, la poignée est cachée dans le logo BMW apposé au centre du hayon. Le volume est vraiment satisfaisant avec 240 litres. On trouve aussi une plage arrière souple optionnelle, qui s’accroche sur le hayon et s’enroule au besoin.
Parlons maintenant de la mécanique. Une simple pression sur la commande du capot, et le verrou cède dans un déclic net. Je glisse la main sous l’arête, soulève : malgré sa dimension imposante, le capot surprend par sa légèreté, fruit d’un usage judicieux des matériaux. Deux vérins hydrauliques prennent aussitôt le relais. Le compartiment moteur est pensé avec rigueur en sachant qu’il reste encore beaucoup d’espace libre. BMW a placé l’un de ses joyaux mécaniques du milieu des années 2000 : le six cylindres en ligne N52B30. Apparue en 2004 sur la 630i, avant de se décliner jusque dans la 130i, cette mécanique marquait une évolution majeure face au précédent M54 du roadster 3.0i. Son bloc, entièrement repensé, combine magnésium et aluminium pour abaisser le poids à seulement 165 kilos, un record pour un L6 atmosphérique de cette cylindrée. Mais la légèreté n’est qu’un aspect : ce moteur, véritable vitrine technologique, associe la levée variable des soupapes Valvetronic et le calage en continu des arbres à cames d’admission et d’échappement, double VANOS. Résultat : un remplissage optimal à tous les régimes, et une disponibilité exemplaire, avec 315 Nm de couple dès 2750 tr/min. L’allonge est tout aussi remarquable : il grimpe sans faiblir jusqu’à 6600 tr/min, délivrant 265 chevaux dans une sonorité à la fois soyeuse et rageuse. Ce raffinement technique ne trompe pas : le N52 a été couronné à deux reprises Engine of the Year, en 2006 et 2007. Il se marie à une boîte manuelle à six rapports. Pour ceux qui préfèrent la douceur, BMW proposait en option une boîte automatique à six rapports, dotée d’un mode séquentiel utilisable via des palettes au volant.
Il nous reste à découvrir l’intérieur. J’ouvre la portière. L’auto possède l’option cuir étendu, bien visible sur les garnitures de portes qui sont de couleur Tan sur la partie centrale. Le seuil est bas, l’accès demande quelques petites contorsions. Une fois installé à bord, la première chose qui frappe est le parfum de cuir, typique des BMW de ces années : cela embaume l’habitacle. La position de conduite est idéale : on est assis très bas, presque au ras de la route, avec les jambes étendues et le volant qui vient naturellement dans les mains. Les sièges baquets M optionnels en cuir Tan sont fermes, enveloppants ; le maintien est idéal. Le cuir respire la sobriété allemande : grain fin, teinte profonde, coutures nettes. L’habitacle se distingue de celui du roadster par son atmosphère plus intimiste.
Devant moi, le volant trois branches M épais tombe juste sous les paumes. Il est équipé des palettes au volant, qui ont la particularité d’avoir toutes les deux la même fonction. On tire pour passer un rapport et on pousse pour rétrograder. Le volant n’est pas chargé de boutons, contrairement aux volants actuels : on a juste les boutons de gestion de l’autoradio. Derrière, le combiné d’instruments BMW classique : deux grands compteurs séparés d’un cerclage profond, lisibles comme des horloges. On retrouve aussi des indications digitales minimalistes : un petit ordinateur de bord est également présent et donne des indications sur la température extérieure, l’heure, la consommation, l’autonomie restante et le niveau d’huile. Ce dernier étant électronique, il se déclenche automatiquement ou manuellement avec un bouton situé à côté de celui pour réinitialiser le compteur kilométrique journalier. Un indicateur de rapport engagé est également présent, vu que mon exemplaire est en boîte automatique.
- L’habitacle de la Z4
- Les sièges M optionnels de la Z4
La planche de bord ne cherche pas à séduire par des artifices : elle impose un minimalisme fonctionnel. Tout est tendu, anguleux, fidèle au langage Bangle : surfaces sculptées, arêtes vives, volumes qui se croisent. Le regard tombe naturellement sur l’océan noir laqué qui domine avec cet insert imposant sur la planche de bord. Les aérateurs au centre sont enchâssés dans des volumes rectilignes. Juste en dessous, le système audio Business ou Professional, selon l’option. Le bloc de climatisation automatique est sur la partie inférieure, très simpliste. Le sélecteur de la boîte est assez gros, cependant il peut basculer vers la gauche en mode séquentiel. À côté, l’interrupteur du mode Sport permet d’améliorer la réponse à la pédale d’accélérateur et de raffermir la direction. Elle est équipée du châssis M, ce qui lui offre des ressorts plus courts de 15 mm et un tarage plus ferme des amortisseurs.
Un peu au-dessus, on trouve les boutons pour les sièges chauffants et la gestion de l’ESP. On trouve le confort d’une époque charnière : régulateur de vitesse, allumage automatique des feux et essuie-glaces. Mais aussi le GPS Professional, avec son écran rétractable motorisé niché au sommet de la console. Cependant, quand il est ouvert, l’interface graphique trahit rapidement l’âge de la voiture. La finition mélange des plastiques rigides mais solides, au grain marqué. Le design de l’habitacle a parfois été critiqué pour son austérité ; mais cette austérité devient une force. Elle cadre avec l’expérience : peu de distractions, concentration maximale sur la route.
Zukunft 4
Le contact est mis. Le six-cylindres en ligne s’éveille dans un grondement feutré mais déjà prometteur. La boîte automatique enclenchée sur « D », je m’extirpe doucement de Voisins-le-Bretonneux. En ville, elle se montre étonnamment docile : direction légère à basse vitesse, boîte fluide, confort correct malgré les suspensions fermes. Les pavés et ralentisseurs rappellent qu’on est assis bas et fermement suspendu. La visibilité arrière, limitée par la ligne fuyante du coupé, demande un peu d’attention lors des manœuvres. L’insonorisation est correcte tant que l’aiguille reste sous les 3000 tours.
Je quitte la ville en direction de Dampierre-en-Yvelines. Dès que la chaussée se rétrécit et ondule, la voiture révèle une autre facette. Le châssis est d’une rigidité exemplaire et ça se ressent immédiatement. Sur les enchaînements sinueux, la voiture vire à plat, soutenue par des barres stabilisatrices renforcées. Le centre de gravité bas colle littéralement la caisse à la route. Je plonge dans les 17 Tournants : le train avant accroche bien, incisif malgré la direction électrique parfois avare en retour d’informations. Le train arrière, lui, se veut joueur. Sans autobloquant mécanique, il faut doser finement à la pédale pour éviter que la motricité ne s’échappe brutalement.
En sortie d’agglomération, la circulation se dégage. J’enfonce l’accélérateur plus franchement. Le moteur délivre sa puissance avec une montée en régime progressive et mélodieuse, jusqu’à ce timbre métallique si caractéristique des blocs BMW de l’époque. Il est rauque à bas régime, métallique à mi-course, puis hurlant à plus de 6000 tours. La boîte rétrograde promptement en mode manuel, donnant la sensation d’avoir le moteur parfaitement sous contrôle. En mode Sport, on gagne un peu en nervosité et la direction est plus ferme. En arrivant fort sur une épingle, j’écrase la pédale de frein. L’ensemble répond bien. Le mordant est franc, la pédale ferme, cependant après plusieurs attaques soutenues, on arrive très vite aux limites malgré l’ajout de durites aviation et d’un liquide de frein adapté.
On perçoit tout de même une légère tendance au cabrage sous forte accélération, puis au transfert marqué au freinage. Sur les petites routes bosselées, les réactions peuvent être sèches, surtout avec les pneus runflat d’origine, mais avec des pneus traditionnels comme ici, le compromis confort/sport gagne nettement en agrément.
Je quitte la Vallée de Chevreuse par Rambouillet pour rejoindre la voie rapide. Ici, l’autre facette de la voiture se dévoile : le moteur tourne bas, la boîte est douce, et la consommation tombe à environ 9 L/100. Le coupé se montre parfaitement stable même à haute vitesse. Les relances pour un dépassement sont linéaires mais puissantes, avec ce chant unique des six en ligne bavarois. Sur ce terrain, la polyvalence routière de la Z4 se confirme : sportif quand on la sollicite, mais aussi capable d’être une grande routière.
Guide du propriétaire
La caisse ne souffre d’aucun défaut structurel connu : la rigidité offerte par cette version fermée reste d’ailleurs l’un de ses points forts. Côté moteur, le six-en-ligne atmosphérique N52B30 est globalement fiable, à condition que l’entretien ait été suivi selon le programme BMW. La pompe à eau électrique et le thermostat doivent être remplacés tous les 150 000 km. Les valves DISA doivent être contrôlées régulièrement et remplacées si elles présentent du jeu. Le nettoyage des filtres à VANOS est à faire régulièrement. La boîte automatique ZF se vidange tous les 120 000 km selon le fabricant, BMW assurant que l’huile est garantie à vie. Un suivi en dehors du réseau peut parfois cacher des compromis discutables, notamment sur la qualité d’huile employée : essentielle sur ce bloc sophistiqué (magnésium-aluminium, injection de pointe pour l’époque).
Petit détail à ne pas négliger : l’absence de jauge d’huile manuelle. BMW l’a remplacée par une jauge électronique affichée au tableau de bord. Conséquence : la vérification du niveau d’huile ne se fait pas à froid, comme le voudrait la tradition, mais moteur chaud et tournant au ralenti. Un réflexe à acquérir pour éviter toute mauvaise surprise.
En 2007, une BMW Z4 Coupé neuve coûtait 40 600 €. Il y a presque dix ans, il était facile de dénicher un exemplaire bien équipé avec le châssis M, les sièges optionnels et pourquoi pas une configuration Individual à moins de 15 000 €. Aujourd’hui, avec l’envolée des prix, les tarifs moyens sont aux alentours de 25 000 €. C’est une côte accessible, une pépite sous-cotée, qui séduit ceux qui savent lire entre les lignes, et qui risque bien, à terme, de devenir l’un des futurs collectors de la marque. Pour un très bel exemplaire avec un faible kilométrage, on passe facilement la barre des 30 000 €.
Depuis quelques années, je suis cotisant du club Z3/Z4 France, qui réunit les passionnés et propriétaires de Z3 et Z4, un club convivial, dynamique et toujours en mouvement grâce à ses nombreuses sorties et ses membres actifs. Et même si vous n’êtes pas encore propriétaire, mais que vous cherchez des informations ou un coup de pouce dans vos recherches pour rejoindre l’aventure, beaucoup d’entre nous, moi y compris, seront ravis de vous aider.
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