Je me retrouve encore et toujours dans l’avion en direction de la Suisse, chez nos amis de chez Leuba Collection. En arrivant dans le showroom, je vois tout de suite la silhouette reconnaissable à 10 kilomètres d’une ancienne 911 Turbo sous bâche, c’est que quand Kévin retire cette dernière que je découvre cette magnifique 964 Turbo 3.3 avec une configuration unique !
Bad boy
Parlons d’abord de l’extérieur, qui est une évolution profonde d’une base datant de 1963 car on reconnait bien le charme originel de la 911 tout en ayant des courbes magnifiquement modernisées et lissées par les boucliers monoblocs n’en donnent que plus de sensualité à son doux regard de batracien et sa célèbre chute de reins. A l’arrière, un imposant aileron ajoute une note supplémentaire quant au caractère de notre belle 911 et on y retrouve aussi une double sortie d’échappement séparée. Elle est équipée de jantes Speedline en 17 pouces, qui deviendront des 18 pouces en 3 parties sur la 3.6. Petit détail très sympathique, les rétroviseurs fuselés qui proviennent des modèles utilisés en Carrera Cup, pour l’aérodynamique.
Véritable beauté fatale, cette 964 Turbo possède une teinte rare, le Cassis Red, qui est semblable à un rose poudré avec un intérieur blanc avec des touches de violets. Pour la petite histoire, cet exemplaire a été commandé par une ancienne propriétaire de 930 Turbo ayant la même teinte qui était disponible au catalogue, hors sur la 964 cette teinte n’était pas proposée, il s’agit donc d’une commande spéciale.
Dès lors que l’on ouvre la voiture, surprise, l’alarme se met en route. Ahh les caprices des alarmes de la fin des années 1980… Une fois que ce petit incident est vu, je me glisse dans les sièges de notre belle allemande et me voilà dans un habitacle entièrement couvert de cuir violet avec une touche de blanc pour les sièges et les portes avec un équipement très complet pour l’époque avec les sièges électriques, un système radio-CD 10HP ou encore la climatisation et bien d’autres options. Par ailleurs, pour les éternels insatisfaits, la liste des équipements Porsche Exclusive permettait quant-à elle de personnaliser chaque modèle par une combinaison unique de teintes et d’équipements. Je règle mon siège, je règle mon rétroviseur intérieur et je passe ensuite sur les rétroviseurs extérieurs qui sont électriques. Un petit joystick se situe sur la porte conducteur pour faire le réglage mais uniquement celui de mon côté, du moins c’est ce que je croyais avant de trouver au bout d’une dizaine de minutes un interrupteur caché au-dessus du neiman pour commuté sur celui du passager. L’ergonomie est bonne et quasiment identique à celle des générations précédentes avec une bonne qualité d’assemblage des matériaux.
Turboooo !
Après un tour du propriétaire, l’heure est au départ, on tourne la clef insérée à gauche, et la magie du Flat 6 refroidi par air commence à envoûter les oreilles ! La destination aujourd’hui sera dans le Col du Marchairuz, soit à environ 1h des locaux de Leuba Collection. La prise en main est assez facile, la position de conduite est idéale pour faire de la grande route ou pour rouler de manière plus sportive. Je noterais que la première chose qui me saute aux yeux, c’est la commande de boîte qui est un peu longue. Notre trajet est composé d’une partie d’autoroute, un terrain de jeu sur lequel elle est à l’aise et idéal pour se rendre compte qu’elle offre beaucoup de confort et de la stabilité à haute vitesse. En sortant de l’autoroute, au niveau d’Aubonne, je fais un arrêt carburant, la tirette pour déverrouiller la trappe est sur la partie gauche de la planche de bord. Une fois terminé, nous pouvons prendre la route vers le col.
Au grand regret des amateurs de sportivité, cette génération s’embourgeoise et encaisse un supplément de poids de plus de 135 kg par rapport à la 930, mais ce handicap est compensé par l’augmentation de puissance et la boîte de vitesses à 5 rapports type G50.52 qui permet une utilisation plus sportive. Elle utilise des trains roulants triangulés, ce qui marque une rupture avec 25 ans d’utilisation des barres de torsion, ce qui joue sur le confort, sur la stabilité mais aussi pour une meilleure précision sur le train avant. Si on ajoute à ça, la direction assistée de série, la maniabilité devient exceptionnelle. Nous sommes avec un temps ensoleillé et une route sèche, mais il est bon de préciser que le nouveau différentiel autobloquant limite à 20% en accélération et à 100% en décélération, ce qui permet d’envisager plus sereinement la conduite sur sol gras, cependant ça ne retire en rien son aspect sauvage. Sur les routes de montagnes, l’arrivée brutale du couple et les réglages souples des suspensions rendent la conduite assez délicate, nécessitant une expérience pour anticiper les réactions de la voiture.
Mention spéciale pour le pédalier qui est parfait pour faire du talon-pointe lorsque l’on arrive sur une courbe. Le freinage est bon, à l’avant on y trouve des disques de 322mm et à l’arrière des disques de 299mm, l’ensemble est mordu par des étriers de 4 pistons tout en étant muni d’un ABS. Comme elle est légèrement sous vireuse, il est essentiel en conduite sportive d’effectuer un léger transfert des masses sans faire décrocher l’arrière, à faire uniquement par expérience surtout avec un moteur en porte à faux. Une fois en phase d’accélération, dès qu’on passe les 3000 trs/min, le turbo s’enclenche et file un gros coup de pied au derrière, et quel plaisir ! Avoir une 911 aircooled ayant un turbo à l’ancienne sur laquelle ton expérience de conduite est ta seule assistance, c’est une thérapie pour n’importe quel passionné !
Lors de notre arrêt photo sur un petit chemin aux abords de la route, c’est le moment idéal pour faire une bonne pause et faire refroidir notre Flat 6 et donc j’en profite pour ouvrir le compartiment moteur, qui sur une ancienne 911, se fait par une tirette présente dans le montant de la porte conducteur pour déverrouiller le capot arrière. Une fois devant la cathédrale, on constate qu’elle reprend la base mécanique de la 930, le Flat 6 3.3L grimpe donc à 320 ch et 450 Nm suite à quelques améliorations comme un nouvel échangeur air/air, une nouvelle injection KE Jetronic, ainsi qu’un nouveau turbo KKK soufflant à 0,7 bar qui délivre le couple sur une plage plus grande et atténuant donc l’effet ON/OFF très particulier de la 911 Turbo originale. L’ajout d’un volant moteur bi-masse permet de réduire les vibrations parasites et l’insonorisation est considérablement augmentée.
Sur la route du retour, notre bilan des performances est plus que satisfaisant avec un 0 à 100 km/h en 5 secondes seulement et 14 secondes plus tard, elle arrive à 200 km/h, ce qui permet d’abattre le 1000m en 24,5 secondes. La vitesse maximale est de 270 km/h, faute à un Cx plutôt grassouillet de 0,36 par rapport à une Carrera classique qui est à 0,32. Enfin, la consommation moyenne en carburant peut varier du simple au double selon l’usage, allant de 15 à 30 L/100 km.
Devenir propriétaire d’un collector
Pour revenir dans le contexte de l’époque, une 964 Turbo 3.3 coûtait 707 000 FF en 1991 soit 181 912€ en 2024, inflation comprise et aujourd’hui la cote moyenne se situe aux alentours des 170 000€ pour un bel exemplaire. Longtemps surcotée, par son statut de dernière monoturbo, son coup de pied au cul plus excitant et sa plus grande rareté, la version 3.6 demeure la plus recherchée, mais la 3.3 est bien plus accessible.
Concernant les rares points faibles, il y a les vérins de capot avec le temps et le turbo qui doit être remplacé aux alentours des 100 à 150 000 km, ce qui coûte 2600 €, hors pose. Pour l’équipement, il varie selon la provenance cependant les exemplaires d’origine française étant les mieux équipées de série, vérifiez la provenance auprès de Porsche France avec le numéro de châssis. Un réglage régulier des culbuteurs est nécessaire, tous les 5 à 10 000 km et bien évidemment faire attention aux exemplaires qui auraient conduit plusieurs conducteurs mal expérimentés vers le fossé.








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